top of page

La fessée doit-elle être interdite ?

Dernière mise à jour : 5 mai 2022


Bettmann /Contributeur/Getty

Article publié sur Capital.fr le 15/11/2018


Être sage ou "se ramasser une fessée" ? Voilà une question qui ne se posera peut-être bientôt plus : la proposition contre les violences éducatives ordinaires, portée par Maud Petit (MoDem), sera dès ce jeudi en audition en commission des lois. 23 pays d’Europe, 54 dans le monde, ont déjà interdits cette pratique, qui a de grandes chances d’être aussi adoptée en France. La règle est de nature exclusivement civile, et aucune sanction pénale ne sera retenue contre les parents qui continueront à donner la fessée à leurs enfants. Alors, faut-il interdire la fessée ? À vous de juger.


1. Ces violences sont néfastes pour la santé de l’enfant


“Les enfants ont droit à une éducation sans violence. Les titulaires de l’autorité parentale ne peuvent user de moyens d’humiliation tels que la violence physique et verbale, les punitions ou châtiments corporels, les souffrances morales”, stipule l’article 1 de la proposition de loi portée par la députée MoDem, Maud Petit, et révélé par Le Parisien. Le docteur Gilles Lazimi, l'un des coordinateurs de la campagne de la Fondation pour l’Enfance, partage cet avis, sur LCI. Ces méthodes seraient “obsolètes, d'un autre monde”, et pourraient provoquer chez l’enfant, du stress et de l'anxiété une fois arrivé à l’âge adulte. Si on ne frappe pas son collègue de travail, “pourquoi le ferait-on avec son enfant ?”, s’interroge aussi Gilles Lazimi. Les personnes qui ont eu des fessées étant enfants, “auraient plus de risques de souffrir de désordres comportementaux ou de problèmes d'alcool ou de drogue”, estime le site Pourquoi Docteur. Par ailleurs, une étude menée il y a trois ans par la revue américaine Pediatrics auprès de plus de 30.000 adultes, aurait montré que “les personnes ayant reçu des fessées ont entre 2 % et 7 % de chances supplémentaires de présenter des pathologies mentales une fois adultes”.


2. La violence éducative est inutile


Ces violences, tolérées dans le cadre familial sur des enfants, sont banalisées et justifiées. Elles sont présentées comme “nécessaires pour bien éduquer les enfants”, résume France Info. Elles sont pourtant mises en doute depuis plus de 25 ans, avec “de très nombreuses recherches universitaires en psychologie, en médecine et en sciences de l'éducation [qui] démontrent sans appel que les châtiments corporels et toutes les autres formes de violences éducatives sont injustifiables”. Elles ne seraient ni utiles, ni inoffensives. “La fessée est le signe d'un manque d'outils pédagogiques”, juge le pédopsychiatre Gilles-Marie Valet dans Madame Figaro. “Le petit a besoin qu'on lui explique les choses, pas qu'on le frappe”. Il rappelle que la violence est nocive pour tout le monde. Pour lui, “l'enfant ne va pas pour autant arrêter de faire des bêtises, mais il sera plus craintif, va devenir cachottier et commencer à mentir”.



3. L’enfant peut introduire la violence dans son fonctionnement d’adulte


La fessée est un coup porté volontairement à un enfant. Comment lui expliquer que la violence, c'est mal, et qu'il ne faut jamais frapper, si on lui met des fessées ? “J’ai donné des fessées et je le regrette”, avoue le député écologiste des Bouches-du-Rhône Jean-Michel Lambert dans Libération. “La violence est quelque chose qui se transmet et se reproduit”. Pour Edwige Antier, pédiatre et ancienne députée, on affirme que les enfants sont de plus en plus violents, par conséquent, les adultes doivent conserver un instrument d’autorité. Les enfants qui tapent sont, selon elle “presque toujours ceux qui ont été tapés”. Elle ajoute que “le respect, l’autorité, ne se gagnent pas en levant la main”. Ainsi, un adulte qui se retrouvera dans des situations avec ses propres enfants, comme “un refus de manger, des cris, une mauvaise note, etc”, verra ressurgir sa mémoire traumatique, explique la psychiatre Muriel Salmona à L’Obs. S’il ne se contrôle pas, “il sera alors envahi par ce qui se passait dans son enfance : sa détresse, les coups, les phrases humiliantes, la colère, voir par la haine de son parent”. Cela peut provoquer chez lui la sensation d’exploser, et déclencher une pulsion violente.


1. C’est une intrusion dans la vie privée


De nombreux opposants à l’interdiction craignent que l’État ne se mêle de l’éducation de leurs enfants. Même si, en réalité, cette pratique ne peut être complètement interdite, et que les parents n’encourent pas d’autre sanction qu’une amende. Cette “immixtion indue dans la vie privée des familles” est faite au nom du bien commun”, rappelle Causeur. “L’État décrète la façon unique et convenable d’élever les enfants et entend bien l’imposer aux parents, qui sont tous comme on le sait, des bêtes ignares et brutales à la main leste”. Pour le mensuel, cette intrusion s’apparente à du totalitarisme, “détournant” le rôle de la loi. Les politiques légiféreraient ainsi sur les moeurs, “’incrimination abusive de la majorité innocente au nom d’une minorité agissante”. De plus, la législation française reconnaît dans sa jurisprudence un “droit de correction à visée éducative” au sein de la famille.



2. La fessée peut être légère et symbolique


Les violences sur les enfants sont déjà punies par le Code pénal, mais seules les violences les plus graves sont réprimées. Et on ne peut pas forcément ranger la fessée dans la catégorie des la maltraitances infantiles. Sylvia Simon, psychologue clinicienne, est “évidemment” contre les fessées administrées pour faire mal à l’enfant, explique-t-elle sur le site Enfants. Néanmoins, “si c'est une légère tape sur le fessier, un geste symbolique, pourquoi pas”, ajoute-t-elle. Cette tape est pour les parents est un “non définitif, un dernier recours”, qui sera d’autant plus dissuasif s’il est exceptionnel.


3. Les enfants pourraient abuser de la loi


"En pratique, l'application d'une telle loi (sur la fessée) reviendrait à confier à une institution le soin d'attaquer les parents sur la base des confidences des enfants", explique l’avocat à la Cour de cassation Didier Bouthors au Point. Autrement dit, de nombreux abus peuvent naître, ou encore “des dénonciations mensongères dont la société française pourrait parfaitement se passer”. En somme, interdire la fessée c’est donner le pouvoir aux enfants, “et après on s'étonne de la hausse des "enfants-Rois" par un manque de fermeté des parents”, lit-on dans un article de 20 minutes, qui relaye les commentaires des internautes. La fessée “montre juste où sont les limites à ne pas dépasser”.

8 vues0 commentaire
bottom of page